Chaque année, plus de 1 000 officines changent de mains. Ces transactions, qui font majoritairement suite à des départs en retraite (1 350 pharmaciens ont fait valoir leurs droits en 2017 selon la CAVP) suscitent souvent l’inquiétude des personnels en place au sein de l’établissement concerné. A tort puisque des règles juridiques garantissent théoriquement la sauvegarde des emplois et offrent même aux salariés la possibilité de s’impliquer dans le projet de reprise. Explication.
Dès lors qu’elle entraîne le départ du gérant historique et son remplacement par un nouveau titulaire, la cession d’une pharmacie représente une étape importante pour les employés de l’établissement : dans certains cas, adjoints ou préparateurs s’interrogent légitimement sur la future orientation stratégique de l’équipe dirigeante et cherchent à déterminer dans quelle mesure une éventuelle réorganisation viendra, au mieux pérenniser ou renforcer leur poste, au pire le menacer. Sur le plan strictement juridique, la loi oblige le repreneur d’une pharmacie à maintenir les emplois existants.
Cette règle, inscrite dans le fameux article L.1224-1 du code du travail, s’applique aux établissements de moins de 50 salariés, soit la totalité des pharmacies – moins de 5% des officines ont un effectif supérieur à 10 personnes (source : OPCA PL, Organisme Paritaire Collecteur Agréé des Professions Libérales). Le texte dispose notamment que les contrats de travail de tous les salariés sont automatiquement transmis.
L’acquéreur est tenu respecter les droits et les obligations attachés à chaque contrat, à savoir le montant du salaire, le coefficient de rémunération, l’ancienneté, la durée hebdomadaire du travail, les droits acquis en termes de congés payés, les conditions particulières telles que la clause de non-concurrence.
En revanche, dès sa prise de fonction, le nouveau titulaire a toute latitude pour mettre en place une nouvelle organisation du travail, redéfinir une stratégie d’entreprise et, le cas échéant, redistribuer les responsabilités.
Les primes contractuelles doivent être maintenues (citons la prime d’équipement ou « de blouse » versée aux salariés qui présentent au moins un an d’ancienneté). En revanche, les primes dites « exceptionnelles » peuvent être réduites, voire supprimées.
Enfin les textes officiels interdisent au vendeur de licencier un salarié en vue de faciliter la transmission de son officine, de même que l’acquéreur n’a, de son côté, pas le droit d’exiger la suppression d’un ou plusieurs emplois comme condition préalable au rachat de l’établissement.
Rappelons aussi qu’un droit d’information, introduit au bénéfice des salariés, s’applique depuis 2014 dans le cadre d’une cession d’entreprise. La loi sur l’Economie sociale et solidaire impose aux chefs d’entreprise de moins de 50 collaborateurs qui envisagent de vendre leur fonds de commerce -ou leurs titres- d’informer leurs personnels de cette opération « au plus tard deux mois avant » l’opération, ou deux ans « au plus tôt ». L’instauration de ce délai vise à permettre aux salariés qui le souhaitent de proposer une offre d’achat concurrente. Précision : certaines des dispositions de cette réforme, et notamment le régime de sanctions applicables en cas de non-respect de ce droit d’information, avaient été assouplies par l’article 204 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Des exemptions sont également prévues pour les transmissions familiales.
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